Comment faire une musique solide et mettre K.O les blocages de composition

Image de Structure d'une chanson créer sa musique bases solides

Tu te sens seul devant ta session à l’écran?

Le regard perdu dans cette page blanche de pistes vierges?

Comme quand tu devais écrire une rédaction à l’école…

L’angoisse.

Par où commencer? Quoi faire pour développer tout un morceau?

L’horloge tourne. Si tu tardes trop à trouver l’idée de départ, le doute va commencer à engourdir ta volonté. Tu le sais.

Surtout que ton hobby MAO est compressé sous une pile d’obligations qui rythment ton planning quotidien. Tu ne peux pas te permettre de passer des heures à te creuser la cervelle.

Toi, tu veux juste te poser devant ton écran et trouver de suite ce que tu dois faire, sans prise de tête.

Alors je vais t’aider. Je vais te montrer comment créer une rampe de lancement pour tes morceaux. Tu vas pouvoir te reposer sur une base solide et focaliser toute ton énergie sur ta créativité.

Un: Applique la méthodologie de cet article.

Deux: Démarre en flèche une infinité de morceaux.

Go!

Pourquoi c’est important d’établir un plan de route pour faire une musique?

Oui, on va parler structure.

Tu te demandes si ça vaut la peine de se prendre la tête avec ça? Eh bien, voici 3 raisons de te convaincre de préparer aux petits oignons le squelette de tes futures productions.

Raison 1: Tes auditeurs sont habitués aux structures communes. Fais une trame trop originale et ils fuiront. (Overdose d’originalité = mise en déroute) Comme quand tu croises ton voisin de 80 ans à demi-nu dans son jardin, chapeau de cowboy et string violet. (Malaise)

Raison 2: Tu sauras quoi faire pour démarrer ta composition, et éviter les blocages. À la place d’une page blanche, tu auras un modèle à trous. Li-bé-ra-teur.

Raison 3: Tu sauras quand tu es arrivé au bout de la composition de ton morceau. Fini les hésitations à te demander si tu dois rajouter une partie, en enlever une autre, etc.

Comment je le sais?

Flashback entre 2003 et 2011.

À cette époque même le plus accroché des auditeurs aurait vomi dans ces montagnes russes sans repères qu’étaient mes musiques: une section A, puis B, C, D, E… (une véritable éjaculation incontrôlée d’originalité)

Et puis un jour, lassé, j’ai voulu faire une musique très simple:

3 guitares. Une structure de base.

Résultat? Le morceau était plié en quelques heures. Et bien plus simple à écouter que tous les morceaux tordus des années d’avant.

Bon, c’était qualité maquette, ok… mais la composition était là.

“Smile, Breathe and go slowly (2011)”:

Musique sous licence Creative Commons BY NC ND

Voilà le pouvoir d’une structure. Elle te libère l’esprit. Elle te donne un cadre efficace dans lequel tu es libre d’exercer ta créativité.

C’est comme pour les fondations d’une maison ou le châssis d’une voiture.

Ce qu’on remarque comme différences entre 2 voitures? tout le reste: la carosserie, l’habitacle, les options, etc. Mais pas le châssis… Tout ce qu’on lui demande à lui, c’est d’être solide. Originalité zéro.

Alors c’est ce que je vais te montrer maintenant: comment créer une base de lancement en béton armé pour tes musiques.

Voici donc comment établir un plan de route à suivre pour créer ta musique

Etape 1: Comprendre les principaux styles de structures

2 grands principes pour structurer une musique:

  • utiliser des sections bien différentes (rock, pop, hip hop, etc.)
  • la faire évoluer de manière plus progressive, en une succession de couches d’instruments, comme des lasagnes. (certains styles d’électro)
1) Structures classiques avec sections différentes

Ici, on rencontre 3 principaux types de sections:

  1. Couplet (ou section “A”): Il revient plusieurs fois dans le morceau. Pour les musiques à texte, c’est ici qu’on expose le récit et les paroles sont différentes à chaque couplet.
  2. Refrain (section “B”): De longueur équivalente au couplet, c’est aussi bien sûr une section qui apparait plusieurs fois dans le morceau. On y trouve le “hook” du morceau, une mélodie destinée à nous rester en tête. Les paroles sont très souvent les mêmes à chaque refrain. Et il n’est pas rare d’y retrouver le titre martelé à répétitions. (c’est quoi déjà le titre du morceau qui fait “we are the champions, we are the champion,…”???)
Image de Freddie Mercury we are the champions
“Weeeee aaaaaare the chaaaaaampioooons!!!
  1. Pont (section “C”): Il sert de contraste avec les autres sections et emmène du nouveau: une suite d’accords, intensité, nouvelle texture, etc. C’est parfois l’occasion de mettre en avant un soliste. Et en général cette section n’apparait qu’une seule fois dans le morceau.

Autres sections : On trouve aussi souvent des parties Intro et/ou Outro. La plupart du temps, il s’agit d’une section existante qu’on dénude pour servir d’introduction ou de conclusion au morceau. Sans oublier aussi les “pré-refrains”, destinés à faire monter l’intensité entre un couplet et un refrain.

La forme la plus courante est ABABCB, le fameux “couplet-refrain-couplet-refrain-pont-refrain” utilisé à toutes les sauces dans les styles grands public. (Et ses variantes: BABCB, ABAB, ABCB)

Exemple de structure ABABCB, avec Mickael Jackson – Beat it:

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Voyons à présent le cas des musiques qui n’ont pas de différences marquées de composition entre chaque sections.

2) Structures par ajout de couches

Ici, les éléments jouent souvent la même chose durant tout le morceau. Ce qui change et qui apporte de la variation, c’est leur sonorité et la densité d’instruments.

On peut distinguer 3 types de sections différentes dans ce genre de musiques:

  1. Buildup: On ajoute des couches d’instrument pour augmenter la densité de la musique et faire monter l’énergie. Un peu comme quand tu secoues une bouteile de coca pour faire une blague douteuse à ton pote. L’énergie monte… on attend l’explosion.
  2. Breakdown: Contraste avec le buildup. Ici on cherche à calmer le jeu avec un passage à faible énergie. On enlève des éléments pour créer un sentiment d’espace (bien souvent la batterie se tait). Les breakdowns sont souvent plus courts que les autres sections.
  3. Drop: C’est l’apothéose du morceau, la section la plus dense. Il peut arriver après un buildup ou un breakdown, selon le relief souhaité. En général 1 ou 2 drops par morceau, pas plus. Alors que les buildup et breakdown se succèdent plus souvent.

Un bel exemple avec ce petit bijou d’Eric Prydz. Un loooong buildup, puis un enchainement de drop/break/buildup, et un bon break de fin:

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Bien. Tu en sais un peu plus sur les différentes sections composant une structure.

Maintenant, voyons un peu comment s’y prendre pour trouver la trame qui te servira à faire tes futures musiques.

Etape 2: Déterminer la structure du morceau en fonction de ton style

Avant tout, tu dois connaitre la structure la plus utilisée dans ton style de musique. Et pour ça, tu n’échapperas pas à une bonne analyse de morceaux pro que tu aimes bien.

Oula, je sais, ça fait peur. Rassure-toi c’est rapide: environ 5mn par morceau.

Voici comment:

  1. Choisis une petite dizaine de morceaux du même genre musical
  2. Ecoute-en un du début à la fin pour avoir une 1ère idée des différentes sections et note-les
  3. Réécoute-le, compte le nombre de mesures pour chaque section et note-les
  4. Recommence pour chaque morceau

Astuce: Tu peux faire l’analyse des morceaux sur Youtube et doubler la vitesse du lecteur pour aller plus vite. Surtout si le tempo du style que tu veux décortiquer est plutôt lent

Image du réglage du paramètre vitesse d'une vidéo Youtube
Clique la petite molette et choisis ensuite la vitesse. Réglages possibles: de 1/4 de la vitesse normale au double

Alors oui, tu vas me dire que c’est bon… que tu connais déjà à peu près la structure de ton style… Pas besoin de faire tout ça. Mais crois-moi, c’est la seule manière d’avoir une “structure type” réglée comme une arme de précision pour le genre de musique que tu veux faire.

D’ailleurs, vérifions justement si on pourrait trouver des différences dans la structure pop. (dont la réputation est que “tous les morceaux se ressemblent”)

Exemple de l’analyse d’une structure, avec le méga-tube dont on nous a fait dégorger les oreilles ces dernières années, j’ai nommé: “Ed Sheeran – Shape of you”:

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  • Intro (A): 8
  • A: 8
  • A’: 8 (variation chant)
  • B: 8
  • B’: 8 (plus d’énergie-Q/R Voix)
  • A: 8
  • A’: 8 (variation chant)
  • B: 8
  • B’: 8 (plus d’énergie-Q/R Voix)
  • C: 8 (break)
  • B: 8
  • B/C: 8 (voix de C fait les questions)

Analyse de la structure d’un autre morceau pop: “Charlie Puth – We don’t talk anymore”:

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  • Intro (B): 8
  • A: 8
  • A’: 8 (variation chant)
  • B: 8
  • A: 8
  • A’: 8 (variation chant)
  • B: 8
  • C: 8 (solo)
  • A’: 8 (break)
  • B: 8
  • B: 8 (tutti)

–> Déjà, on voit bien des différences de schéma entre ces 2 morceaux.

Mais l’essentiel pour notre analyse sera de relever les points communs d’une dizaine de morceaux du style, pour construire notre structure type. Ici, avec juste 2 morceaux passés au crible, on pourrait déjà se noter ces premiers points communs:

  • variation du chant sur la 2ème partie du couplet
  • découpage strict de 8 mesures
  • break avant le dernier refrain

Et je te parierai même mon vieux pyjama Mickey que tu serais passé à côté de ces détails sans cette rapide analyse.

C’est pourquoi ce simple exercice, est crucial pour te révéler non seulement le tronc commun de l’architecture du style qui t’inspire, mais aussi des idées de variantes à réutiliser par la suite.

Relève bien le nombre de mesures pour chaque section.

(Rappel: une mesure ou “bar” en anglais, dans 90% des cas pour les musiques actuelles, c’est 4 temps. Quand tu comptes “1… 2… 3… 4…”–> tu as compté une mesure)

Voyons à présent comment se servir d’une structure type pour créer ta musique.

Etape 3: Un canevas à disposition

Dans ton logiciel MAO, ouvre un projet vierge et sers toi des marqueurs pour repérer chaque section.

Compte bien le nombre de mesures pour chacune et enregistre ton projet sous le nom du style.

Ex: “Projet Rock”

Ou encore mieux sous un “template”. Un modèle de session à rappeler quand tu voudras créer un morceau du genre. (voir le manuel de ton logiciel)

Dès que tu auras des idées de composition, il ne te restera plus qu’à rappeler cette session, puis à remplir les cases.

Tu n’auras plus tout un morceau à batir à partir d’une page blanche, tu auras juste 2 ou 3 sections différentes à trouver. Grosse différence.

Tu pourras alors te reposer en toute tranquilité sur une structure solide, qui te dirigera pour construire un morceau profilé comme une Ferrari.

Le mieux dans cette histoire?

Cette trame pourra être réutilisée à l’infini pour tous les morceaux que tu voudras faire dans ce style. Tu fais le taf une fois. Ça te sert toute la vie.

Attention: si en cours de composition, tu estimes qu’une section doit durer deux fois plus longtemps, n’hésite pas: fais selon ton instinct. La structure type n’est là que pour te guider, te donner l’impulsion de départ, une direction. Elle n’est pas un cadre rigide et inflexible.

Créer sa musique à partir d’une page blanche: de l’histoire ancienne…

Tu hésitais dans tes débuts de compos? Tu te perdais en cours de route?

–> Tu viens de découvrir qu’établir la structure avant même de commencer à faire une musique, c’est te baliser le chemin pour mieux avancer.

C’est comme quand ta prof te disais de faire une rédaction. Difficile de se lancer… une page blanche, c’est intimidant.

Mais si tu utilises la fameuse structure: introduction, thèse, antithèse, synthèse, conclusion. Alors ça te permet de découper cette tâche en plusieurs parties. Bien plus abordable et digeste.

Alors oui, analyser des musiques, c’est pas marrant, ni facile… mais c’est un incontournable pour tout producteur sérieux qui veut s’améliorer en composition et arrangement.

Plus tu en feras, plus tu intégreras comme une seconde nature ces notions de structures qui font la différence entre un morceau boiteux et un morceau qui déboite. Tes musiques seront terminées plus vite, elles seront aussi plus efficaces.

Et au final, tu te demanderas comment tu as fait pour t’en passer tout ce temps.

Alors fais-toi cette faveur dès maintenant: ouvre Youtube, recherche un de tes morceaux favoris et relève sa structure sur ton carnet de notes. Ça te prendra 5 minutes, 10 peut-être.

Et ce sera déjà un pas énorme dans la découverte de comment sont fabriqués les sons qui te font vibrer. Tu apprendras beaucoup, aiguisera ton oreille et ce sera peut-être même une révélation qui te mènera à t’impliquer à fond dans cette technique.

Pour que tu saches enfin comment construire des morceaux en béton armé, sans galérer pendant des plombes au démarrage.

A noter: j’ai moi-même utilisé une structure pour rédiger cet article… sinon, je serai encore en train de taper sur mon clavier à l’heure qu’il est 😉


Alors, tu as décidé t’y mettre? Tu as essayé?

–> Dis-moi tout dans les commentaires.

On continue la discussion et tes retours profiteront aux autres musiciens qui seront de passage ici.

Julien Moulinié-Chaumel
 

Musicien passionné par l'univers Home-studio, Julien doit encore être en train de rassembler ses idées pour écrire des articles bien détaillés. Et tout ça avec un seul but: t'aider à créer dès maintenant ta propre musique.

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Éric

Merci Julien pour ton partage d’expérience. Comme tu l’expliques si bien, en effet la structure est l’épine dorsale d’un morceau réussi; et avoir des repères est vital pour éviter de se perdre ou resté bloqué. En même temps, il faut savoir aussi se libérer de modeles pré établis. Je pense aux Beatles qui en leur temps ont un peu bouleversé les structures. Mais nous ne sommes pas les Beatles

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    Julien Moulinié-Chaumel

    Oui merci, bonne remarque Eric.
    C’est vrai qu’on n’est pas les Beatles… ces gars là avaient un beau bagage en composition.
    Par contre quand on débute, c’est important de connaître les modèles qui marchent. La transgression des règles est possible, mais plus tard… quand on connait déjà bien les règles justement

    Reply
Raphaël Sauer

Salut Julien ! Encore plein de conseils judicieux pour s’organiser. Merci ça me redonne le courage de continuer à composer. C’est vrai qu’on se perd vite et on se sent parfois dépassé quand il faut maîtriser la technique en mao. Je pense à l’apprentissage des logiciels et du matériel avant même la phase de création. Avec toute les possibilités offertes par la puissance technologique et par la diversité des moyens de création sonore, on se retrouve parfois paradoxalement, à cours d’inspiration. Tes techniques permettent de se recentrer et d’avoir un super point de départ.
Merci aussi pour ta généreuse liste de sites pour trouver des trouver des samples.
Bonne continuation !

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    Julien Moulinié-Chaumel

    Salut Raphaël,
    Merci pour tes encouragements.
    Oui c’est vrai qu’on est vite distrait par la technologie. Mais peu importe les outils finalement, la base de la création musicale reste la même depuis des siècles. Trouver une idée, la structurer, etc.

    Reply
Renaud

Salut Julien, je viens de découvrir ta page et franchement elle est parfaite, t’es conseils sont simples , ludiques et facile à applique,je vais reprendre ton schéma de structure ça va me faire gagner un temps fou!!!! Merci!!!

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Julien Paquier

Salut Julien,

C’est peut-être pour moi de loin l’article le plus important de tout ton blog !!!
En effet, j’avais moi-même appliqué cette technique de structure il y a une bonne dizaine d’années !!! J’avais d’ailleurs réussi à plier un morceau en l’espace d’une journée sans trop me prendre la tête dans les détails avec une rapidité déconcertante !!! Va savoir pourquoi OUI POURQUOI je n’ai pas continué sur cette lancée les années qui ont suivies !!! J’ai perdu un temps précieux !!! Je me suis laborieusement embourbé dans une recherche massive d’instruments virtuels, d’effets audio (ex: la meilleure reverb de tout le temps,…), d’effets MIDI (générateurs d’accords, step sequenceurs,…), d’ambiances sonores et sound effects !!! Au lieu de m’éveiller d’avantage et de parfaire cette implacable technique, je suis allé m’endormir ailleurs et je me suis bien perdu en cours de route !!! Je suis tombé sur ton blog ces dernières semaines et tu m’as redonné foi en la composition en Home-Studio (j’ai énormément douté et voulu tout arrêter plus d’une fois).
UN GRAND MERCI A TOI : tes conseils sont hautement qualitatifs, non dénués d’humour et ta générosité sans limite…

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    Julien Moulinié-Chaumel

    Waw, tu es tombé dans les mêmes travers que moi…
    (c’est pourquoi j’insiste souvent sur l’illusion des achats compulsifs de plugins d’effets et matériels, surtout quand on débute)

    Et on est bien d’accord: le pire ennemi en home studio est le doute.
    Une fois que tu t’es prouvé que tu peux faire des musiques dont tu es fier, de chez toi, en pantoufles, ça change la vie 🙂

    J’espère que tu trouveras ici les réponses et surtout la motivation dont tu as besoin pour atteindre tes rêves.
    Merci pour ton retour très enthousiastes

    Bon kiff et bonnes musiques 🙂

    Reply
Sylvano Mabom

Heuuuu… You are the guy! Nothing more to say

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